Prédire la prochaine catastrophe naturelle dans la région du Kivu

HARISSA

Titre du projet

Le glissement de terrain qui s’est produit dans le territoire de Kalehe © Kivu CO / OC du Kivu

‘Natural HAzards, RISks and Society in Africa: developing knowledge and capacities’ (HARISSA)

(Catastrophes naturelles, risques et société en Afrique : connaissances et compétences) 

Lieu

RDC, provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu
Ouganda, sous-région du Sud-Ouest 

Durée

2019 – aujourd’hui

Participants 

Le réseau Kivu Citizen Observers (observateurs citoyens du Kivu), qui regroupe 22 agents de l’unité de Protection civile des provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu

Les observateurs citoyens du Kivu étudient les catastrophes telles que les glissements de terrain, les inondations, les tempêtes de vent, les tempêtes de grêle, la foudre et les tremblements de terre qui se produisent au Kivu, une région où les informations étaient inexistantes jusqu’il y a peu.

Opérationnel depuis décembre 2019, ce réseau comprend 22 observateurs citoyens, tous agents de la Protection civile. À l’aide d’un smartphone, ils récoltent des informations sur six types différents de catastrophes. Pour avoir couvert pendant quatre ans une superficie de 60 000 km2 (soit deux fois celle de la Belgique), ils ont rapporté plus de 1000 événements, dont les trois quarts sont géolocalisés.

Être un OC (observateur citoyen) du Kivu est un réel engagement. Cela signifie non seulement être confronté aux lourdes situations qui font suite aux catastrophes et où la population attend une assistance extérieure, mais aussi faire face à des barrières structurelles et sécuritaires qui peuvent les empêcher de mener à bien leur mission avec succès et en toute sécurité.

Que se passe-t-il lorsqu’une catastrophe se produit ? Rajabu, OC dans le territoire de Kahele, parcourt parfois des dizaines de kilomètres à moto pour atteindre le site d’un glissement de terrain dévastateur. Son intervention est entravée par le mauvais état des routes et de mauvais réseaux de communication. Une fois dans la zone impactée, il documente l’événement en prenant des photos et en réalisant de courtes vidéos. Il parle avec les résidents locaux pour rassembler des informations structurées sur l’événement et son impact. Mais son travail ne s’arrête pas là ! Les données sont ensuite mises en ligne et partagées avec les coordinateurs de la Protection civile et les scientifiques qui étudient ces phénomènes dans la région. Une chose très importante est que, dans ces communautés, il est perçu comme un expert de terrain et une personne de contact qui peut leur donner des informations sur le risque de catastrophe.

 

Pourquoi est-il important de relayer les observateurs citoyens pour assurer le suivi des catastrophes naturelles en Afrique centrale ?

Le Dr John Sekajugo a passé quatre années à étudier les données récoltées par le réseau des observateurs citoyens ougandais. Selon lui, « les OC sont capables d’enregistrer de petits événements qui se produisent à l’échelle locale et sont impossibles à détecter par imagerie satellite. La science citoyenne complète la télédétection, qui acquiert les informations à distance ». Les recherches du Dr Sekajugo montrent que la science citoyenne est l’approche idéale pour rassembler des informations sur des catastrophes de moindre ampleur mais fréquentes.

Le Dr Caroline Michellier est géographe spécialisée dans la vulnérabilité des populations et l’évaluation des risques qu’elles courent par rapport aux catastrophes naturelles en Afrique centrale. Elle rencontre régulièrement les observateurs citoyens. Avec Théo Mana, le superviseur de l’équipe, elle les entraîne pour qu’ils améliorent la qualité des données récoltées, et qu’ils deviennent de véritables experts de terrain. Le Dr Michellier explique que la création du réseau des observateurs citoyens du Kivu a été inspirée par l’expérience du passé : 

« L’idée sous-jacente qui devait conduire au développement du réseau des OC du Kivu était que nous connaissons les catastrophes qui se produisent, mais nous ignorons totalement où, quand, combien ou pourquoi. Nous inspirant du succès du premier réseau mis en place en Ouganda, nous avons créé le réseau des OC du Kivu pour comprendre les événements qui se produisent dans une région non encore documentée. »

Ce qui importe, outre les bénéfices scientifiques du projet, ce sont ses implications sociales et politiques. Avec le temps, l’impact du travail des observateurs citoyens grandit. Leurs contributions sont de plus en plus essentielles pour les dynamiques et le bien-être de la communauté, pendant que leurs responsabilités au sein de la Protection civile, qui est à la fois leur institution d’origine et celle qui est chargée de la réduction du risque des catastrophes, se sont accrues.