Les glissements de terrain lents, une menace grandissante mais ignorée pour les communautés des montagnes

aerial shot of landslide in Funu, Bukavu, DRC

Le grand glissement de terrain à évolution lente de Funu à Bukavu en 2018. L'escarpement très raide qui délimite la partie supérieure du glissement de terrain a une hauteur de 100 mètres. Toutes les habitations situées à l’avant cet escarpement sont dans le glissement de terrain.
© A. Dille, AfricaMuseum

Aux mots « glissements de terrain », on associe communément des effondrements soudains de pans de terre ou de rochers se détachant des montagnes. Mais il existe aussi des glissements de terrain lents – dont la vitesse est de l’ordre d’un millimètre à quelques mètres par année –, qui représentent également une menace grandissante pour les populations que la croissance urbaine et le risque d’inondation poussent à s’installer sur des pentes escarpées.

C’est ce que des chercheurs de plusieurs institutions, dont l’AfricaMuseum, ont découvert et rapporté dans un article consacré à la façon dont la pression urbaine conduit les populations à s’exposer à des mouvements de terrain lents.
Dans toutes les régions étudiées, l’expansion des  centres urbains est associée à une croissance de cette exposition. Lorsqu’une ville croît, elle peut être forcée de s’étendre sur des terrains pentus dont on sait qu’ils connaissent des mouvements lents. Mais, soulignent les auteurs, cette exposition accrue touche surtout les plus pauvres qui n'ont souvent pas d'autre choix que de s'installer dans ces versants instables. 

Les pentes où se produisent les glissements de terrain lents peuvent à priori sembler sûres pour s’y installer. Le glissement peut être imperceptible, voire non détecté, mais à mesure qu’il progresse, les maisons et d’autres infrastructures peuvent subir des dommages. Une accélération soudaine peut aggraver ceux-ci et, dans de rares cas, causer des décès. A Bukavu, par exemple, une ville de la République démocratique du Congo, un quartier où vivent 80 000 personnes, souvent dans des conditions précaires, est exposé à ce type de pente en mouvement lent, déclare Olivier Dewitte, chercheur sur les aléas naturels à l'AfricaMuseum et coauteur de l'étude.   

Sachant que près de 1,3 milliard de personnes vivent en région montagneuse, on se rend compte que le potentiel d’exposition est très élevé au niveau mondial. « Les populations montagnardes font face à des risques croissants de glissements de terrain et d’inondations, exacerbés par le changement climatique », déclare Joaquin Vicente Ferrer, chercheur de l’université de Potsdam spécialisé dans les aléas naturels et auteur principal de cette étude. « Il sera crucial d’approfondir notre connaissance de la façon dont la croissance des risques d’inondation et l’urbanisation peuvent pousser des communautés vers des pentes instables si l’on veut gérer le risque d’exposition et limiter les catastrophes ».
Cette étude est publiée dans Earth’s Future, une revue de l’AGU disponible en open-access et soumise à une évaluation scientifique (peer review). Vous pouvez la lire et la télécharger en PDF ici.

 

Ferrer, J.V., Samprogna Mohor, G., Dewitte, O., Pánek, T., Reyes‐Carmona, C., Handwerger, A.L., et al. (2024). Human settlement pressure drives slow‐moving landslide exposure. Earth's Future 12(9): e2024EF004830